Lorsque MASERATI a dévoilé le Grecale le 22 mars 2022, le monde automobile a retenu son souffle. Ce SUV compact de luxe, baptisé d’après un vent méditerranéen violent mais frais, promettait de marier l’héritage sportif de la marque au Trident avec une modernité audacieuse. Trois ans plus tard, le Grecale se fait petit à petit une place dans le segment des SUV haut de gamme, afin de rivaliser avec des poids lourds comme le PORSCHE Macan, le BMW X3 ou l’AUDI Q5. Mais qu’est-ce qui rend ce modèle si spécial ?
Un héritage revisité : l’histoire derrière le nom
MASERATI a une longue tradition de nommer ses créations d’après des vents célèbres. Depuis la Mistral en 1963, en passant par la Ghibli et la Bora, chaque appellation évoque une force naturelle, un souffle de puissance et d’élégance. Le Grecale ne déroge pas à cette règle. Inspiré du Gregale, un vent du nord-est qui balaie la Méditerranée, ce SUV compact veut incarner un « vent nouveau » pour la marque italienne, propriété du groupe STELLANTIS. Annoncé lors de la présentation spectaculaire de la supercar MC20 en septembre 2020, le Grecale est lancé le 22 mars 2022, à Cassino, en Italie.
Ce retard n’a fait qu’attiser la curiosité. Positionné sous le Levante dans la gamme MASERATI, le Grecale vise un public plus large, tout en conservant l’ADN luxueux et sportif qui définit la marque depuis plus d’un siècle. Avec des dimensions de 4,85 mètres de long, 1,67 de hauteur, 1,95 mètre de large (sans les rétroviseurs) et un empattement généreux de 2,90 mètres, il se place dans une catégorie où la concurrence est féroce. Mais MASERATI a une carte à jouer : celle d’un style inimitable et d’une expérience de conduite qui va au-delà des chiffres bruts.
Design : l’élégance à l’italienne rencontre la modernité
À première vue, le Grecale est indéniablement une MASERATI. La calandre imposante, ornée de l’emblématique Trident, domine la face, tandis que les optiques verticales confèrent une allure agressive et contemporaine. Les trois ouïes latérales sur les ailes avant, un clin d’œil au passé de la marque, ajoutent une touche de caractère, tandis que l’arrière massif et la lunette inclinée dynamisent le profil. À l’arrière, les feux en forme de boomerang, s’intègrent harmonieusement à une silhouette fluide et musclée.
Mais le Grecale ne se contente pas de reprendre les codes esthétiques du Levante, son grand frère. Il s’en distingue par une approche plus compacte et une finesse dans les détails. Les poignées de porte affleurantes et les jantes au design inspiré du Trident (allant jusqu’à vingt et un pouces) témoignent d’une attention portée à l’aérodynamisme et à l’élégance. À l’intérieur, l’expérience est tout aussi saisissante. Le tableau de bord minimaliste est dominé par deux écrans tactiles : un de 12,3 pouces pour l’info-divertissement (avec Carplay) et un second de 8,8 pouces pour les commandes de confort, comme la climatisation. On pourrait reprocher le positionnement du commodo avant/neutre/arrière/parking qui demande un temps d’adaptation pour une utilisation fluide. Une horloge numérique centrale, remplaçant les aiguilles traditionnelles, symbolise ce mariage entre héritage et modernité. D’un point de vue ergonomique, on regrette que l’accessibilité aux clignotants est gênée par la position des palettes. En parlant des clignotants, le bruit de ces derniers est assez « kitch » pour ce standing. Notre modèle d’essai était équipé de la vision tête haute qui est difficilement lisible pour les personnes de grande taille. A ce prix, on aurait apprécié de disposer d’une application pour contrôler son véhicule à distance.
Les matériaux sont à la hauteur des attentes : cuir de haute qualité, fibre de carbone et inserts en aluminium habillent un habitacle spacieux. Avec un coffre de 570 litres, le Grecale se veut aussi pratique, un atout non négligeable pour séduire les familles aisées à la recherche d’un SUV polyvalent. Ajoutez à cela un système audio immersif Sonus Faber de quatorze haut-parleurs (vingt et un en option), et vous obtenez un cocon luxueux où chaque trajet devient une expérience sensorielle.
Sous le capot : une palette de puissance
Le Grecale se décline en plusieurs versions, offrant un éventail de motorisations qui répondent aux attentes variées des conducteurs modernes. À son lancement, trois variantes à essence étaient proposées : la GT, la Modena et la Trofeo. Les deux premières reposent sur un quatre-cylindres 2.0 litres turbocompressé avec hybridation légère. La GT délivre 300 chevaux et 450 Nm de couple, offrant un 0 à 100 km/h en 5,6 secondes et une vitesse de pointe de 240 km/h. La Modena, légèrement plus musclée, passe à 330 chevaux, abaissant le 0 à 100 km/h à 5,3 secondes.
Mais c’est la version Trofeo, de notre essai, qui fait battre le cœur des puristes. Elle est équipée du V6 bi turbo Nettuno de 3.0 litres, dérivé de la MC20, qui développe 530 chevaux et 620 Nm de couple. Résultat ? Un sprint de 0 à 100 km/h en seulement 3,8 secondes et une vitesse maximale de 285 km/h. Ce moteur, couplé à une boîte automatique à huit rapports et à une transmission intégrale couplée à un différentiel électrique à glissement limité, place le Grecale Trofeo parmi les SUV les plus performants de sa catégorie. Sur la route, il offre une sonorité rauque et envoûtante, typique de MASERATI, même si on peut noter que le châssis, bien que compétent, n’atteint pas la précision chirurgicale d’un PORSCHE Macan. Il faut compter une consommation de 16 l/100 km minimum sur cette version Trofeo soit une autonomie de 420 kilomètres (seulement).
En 2023, MASERATI a enrichi la gamme avec le Grecale Folgore, sa première incursion dans le tout-électrique pour ce modèle. Propulsé par deux moteurs électriques (un par essieu) cumulant 550 chevaux et 800 Nm de couple, alimentés par une batterie de 105 kWh, le Folgore promet une autonomie de 500 kilomètres (cycle WLTP) et un 0 à 100 km/h en 4,1 secondes. Présenté au Salon de l’Auto de Shanghai en avril 2023, il se distingue par une calandre partiellement fermée et une teinte cuivrée exclusive : le Rame Folgore. À l’intérieur, des matériaux recyclés comme l’Econyl (nylon régénéré) soulignent une approche plus durable, sans pour autant sacrifier le luxe.
Sur la route : luxe et compromis
Conduire un Grecale, c’est plonger dans une dualité fascinante. La suspension pneumatique, disponible en option, permet d’ajuster la hauteur de caisse, offrant un confort remarquable sur autoroute tout en restant suffisamment ferme pour attaquer les virages. Les modes de conduite (Confort, GT, Sport, Off-Road et surtout Corsa), réglables par une molette au volant, modulent la réponse du moteur, de la direction et de la suspension, garantissant une polyvalence rare pour un SUV de ce calibre. Pourtant, ce Grecale ne surpasse pas ses rivaux allemands en termes de dynamisme pur. Le PORSCHE Macan, par exemple, offre une connexion plus immédiate avec la route, tandis que le Grecale privilégie une approche plus équilibrée entre confort et sportivité.
Le Folgore, quant à lui, impressionne par sa puissance instantanée et son silence de fonctionnement, mais son poids (plus de deux tonnes) se fait sentir dans les enchaînements rapides. MASERATI a toutefois travaillé l’aérodynamisme et la répartition des masses pour limiter cet effet, et le résultat est un SUV électrique qui rivalise honorablement avec des modèles comme le TESLA Model Y Performance.
Positionnement et concurrence : un pari audacieux.
Avec un prix de départ avoisinant les 82.150 € dans sa version de base, le Grecale se positionne dans le haut du segment des SUV compacts de luxe (sans compter le malus écologique). La version Trofeo, elle, flirte avec les 125.650 €. Face à lui, le PORSCHE Macan (à partir de 83.000 € environ) offre une alternative accessible, tandis que le BMW X3 M ou le Mercedes-AMG GLC 63 jouent dans une cour plus exclusive.
MASERATI mise sur son aura italienne et son design distinctif pour se démarquer. Là où les marques allemandes privilégient souvent une approche clinique et technologique, le Grecale injecte une dose de passion et d’émotion. Mais ce positionnement a un coût : certains reprochent à MASERATI de ne pas avoir poussé l’audace stylistique encore plus loin, ou de dépendre trop fortement de la plateforme Giorgio partagée avec l’ALFA ROMEO Stelvio.
Verdict : une brise qui décoiffe
Trois ans après son lancement, le MASERATI Grecale s’affirme plutôt comme une réussite. Il ne révolutionne pas le segment, mais il apporte une proposition unique : un mélange de luxe, de performances et de charisme italien qui séduit ceux qui cherchent à se démarquer. Le Folgore, en particulier, ouvre une nouvelle ère pour MASERATI, prouvant que la marque peut s’adapter aux exigences de l’électrification sans perdre son âme.
Alors, le Grecale est-il le vent de changement tant espéré pour MASERATI ? À bien des égards, oui. Il ne détrône pas encore le PORSCHE Macan en termes de pure dynamique, mais il offre une alternative crédible et désirable surtout dans cette version Trofeo. Dans un marché saturé de SUV premium, le Grecale souffle une brise fraîche, rappelant que l’exceptionnel peut encore trouver sa place au quotidien.
S. Perezzan (10/03/2024)







